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  Brume de sang, est une biographie romancée de Li Po, un grand poète chinois du 8ème siècle, un personnage fantasque et attachant dont l'oeuvre marqua la littérature chinoise.

 

Li Po

 

Li-Po.jpg« J’ai dans ma maison, le plus grand poète peut-être qui ait jamais existé : Je n’ai pas osé en parler encore à Votre Majesté, à cause d’un défaut dont il paraît difficile qu’il se corrige : il aime le vin, et en boit quelquefois avec excès. Mais que ses poésies sont belles ! » C’est ainsi, selon le Père Amiot, que le ministre Ho présenta Li Po à l’empereur Xuangzong. L’empereur lut les vers que son ministre lui montra et, enthousiasmé, demanda à ce qu’on lui amène le poète. Li Po venait de gagner sa place à la Cour du plus illustre empereur Tang. Il y brilla autant que l’étoile qui accompagna sa naissance.

 

Ne faudrait-il donc voir en Li Po, qu’un lettré, un courtisan, ami de l’empereur dont la protection lui permettait bien des incartades et des insolences ? Cette vie facile ne lui convenait pas en réalité. Lassé des jalousies, des intrigues de ses rivaux et de ceux qu’il avait publiquement blessés et malgré l’insistance du souverain, désireux de le garder auprès de lui, il partit sur les chemins de la Chine partageant avec ses compagnons rencontrés dans les auberges le vin qu’il leur offrait avec les mille onces d’or offertes par l’empereur.

 

Le vin, toujours le vin ! Li Po, buveur invétéré alors ? La réponse est dans ses vers :

« Du vin exquis dans des coupelles mille fois remplies ;

Emmener avec soi le plaisir, et se laisser porter par les flots. »

Emmener avec soi le plaisir. C’est bien de cela qu’il s’agit, chaque fois qu’il lève sa tasse en clamant ses vers, c’est pour chanter l’émoi de la jeune fille au passage de beaux jeunes gens, le temps où le soleil éclaire la joie des convives ou évoquer de voluptueux souvenirs « derrière des rideaux brodés de lys. »

 

Le vin encore ! Mais cette fois, il s’agit de tout autre chose comme l’écrit son ami Tu Fu : « Malgré les appels de son souverain, il refuse de monter sur la barque impériale. Excusez, Sire, dit-il, je suis le dieu du vin ! »

Ivre peut-être, mais jamais suffisamment pour perdre la raison. Li Po est un homme libre et, en ces temps où le souverain a droit de vie et de mort sur ses sujets, il ne s’en cache pas : « Quand l’ivresse m’exalte… je me ris de toutes les grandeurs. » On pardonne plus facilement à un ivrogne les écarts. Et lorsque Li Po sera reconnu coupable d’avoir trahi son empereur, condamné à mort, gracié mais forcé à l’exil,  c’est à son talent et à son renom qu’il devra la vie.

 

Oublions alors cette image de bon-vivant qui colle à ses pas et que, seul, reste le souvenir d’un homme traversant une époque de splendeur et d’horreur. Il en dénonce les crimes et les injustices, s’émeut de la tristesse de la jeune fille dont le mari est tombé dans la bataille. Et l’artiste qui confiait son cœur accablé aux rayons éclatants de la lune ne pouvait faire autrement, dernier hommage à la nature, que de laisser le fleuve emporter son corps, semblable aux poèmes d’amour qu’il abandonnait à son cours.

 

 

C’est aux paradis des Immortels que nous le retrouvons dans Brume de sang. Il méritait bien de continuer à observer du haut de ces lieux mythiques l’agitation des humains ; de ses amis, de ses ennemis et surtout de deux de ses bâtards, un fils et une fille semés au cours d’un de ses nombreux voyages à travers le pays. Quel père resterait indifférent aux efforts de ses enfants tentant, au péril de leur vie parfois, de retrouver les traces laissées lors de son passage parmi les vivants ? Il y a tant de mystères autour de sa mort. Et puis, il y a aussi cette énigme entourant un paysage peint, un dernier message laissé par le facétieux poète dont le contenu est si important qu’il attire la convoitise d’un jeune intrigant, un personnage maléfique comme on en rencontre nulle part ailleurs qu’à la Cour de l’empereur de Chine.

 

Brume de sang, un roman de Marcel Baraffe aux Editions Orizons.

 

 

 

Tag(s) : #Chine ancienne
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